Starship Troopers
- Titre original : Starship Troopers
- Réalisé par : Paul Verhoeven
- Musique de : -
- Date de sortie ciné : 21 janvier 1998
- Date de sortie vidéo :
- Classification : Interdit aux moins de 12 ans
- Genre : Action. Science Fiction.
- Origine : Etats-Unis
- Durée : 125 minutes
- Produit par : Jon Davison. Alan Marshall.
- Scénariste(s) : Ed Neumeier
- Distributeur(s) :
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Informations techniques sur Starship Troopers
- Distribution
- Résumé
- Photos
- Bandes-annonces
Critiques de Starship Troopers
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10.0
Vers un fascisme démocratique par auteur inconnu
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Dans un futur lointain, où le monde est devenu une fédération en guerre contre les arachnides (des vilains insectes, aussi appelés parasites, vivant dans d?autres systèmes galactiques), des jeunes de Buenos Aires qui viennent de finir le lycée s?engagent, pour diverses raisons, dans le service fédéral. A des niveaux de responsabilité différents (Johnny Rico et Dizzy Flores dans l?infanterie mobile, Carmen Ibanez dans la flotte spatiale, Carl Jenkins dans la recherche militaire), ils auront à lutter contre les arachnides?
Le film est l?adaptation d?un livre de Robert A. Heinlein qui pâtit d?une réputation sulfureuse (relents fascistes semble être la formule retenue par d?autres pour qualifier ce livre que je n?ai pas lu) .
Quoiqu?il en soit, si l?on s?en tient au film et rien d?autre, le propos est extrêmement clair pour qui veut bien se donner la peine de lire entre les images, et il est tout aussi clair qu?il faut en attribuer la paternité à Paul Verhoeven et son scénariste Ed Numeier (déjà en collaboration sur Robocop, autre film de SF brutal et grinçant) plus qu?au controversé Heinlein.
Ici, lire entre les images n?est pas une mince affaire : tout est fait pour que le spectateur s?identifie à l?épopée de Johnny Rico, les effets spéciaux sont époustouflants et la musique très militaro-héroïque de Basil Poledouris (lui aussi à l??uvre sur Robocop) apporte un souffle épique à l?action qui brouille toute tentative de voir les choses calmement.
Tout d?abord, examinons le monde dans lequel évoluent nos protagonistes. Beaucoup d?informations nous sont données mais elles sont délibérément noyées dans l?intrigue (la scène d?exposition en classe) ou dans des scènes chocs (la douche mixte) ce qui fait qu?on n?y prête pas beaucoup d?attention.
Ce monde, c?est une fédération planétaire idéalisée où l?égalité s?est enfin affirmée. En effet, on aperçoit à plusieurs reprises des femmes occuper des postes de responsabilité élevés et surclasser les hommes : au football américain, au combat, à l?entraînement, ou encore en plein vol. De même, on a droit à plusieurs personnages influents qui ne sont pas blancs et le droit de vote est ouvert à tous. Ajoutez à cela une abondance d?éphèbes beaux, vigoureux et « purs », c?est-à-dire non entachés par le « vice » (l?invraisemblable scène de la douche nous renvoie à une nudité débarrassée de tout honte) et vous obtenez une vision infantile de la société harmonieuse, civilisée et parfaite que devrait être une démocratie.
Mais plusieurs énormes paradoxes ébranlent l?exemplarité de ce régime futuriste.
En premier lieu, il y a les topos du professeur Rasczak sur les « théories de la démocratie » (en version originale, on parle de « failure of democracy » et de « chaos » ) et sur ces « scientifiques sociaux » fondateurs qui ont permis l?essor de ce nouveau régime , maintenant stable et sous contrôle de généraux depuis plusieurs générations.
La différence morale officielle qui sépare les civils des citoyens (ces derniers accomplissent le service fédéral et défendent le corps politique au péril de leur vie) nous laisse entendre que les civils sont largement déconsidérés et privé de droits, ce que nous confirme une confidence d?une soldate pour qui le seul moyen d?avoir un enfant est de devenir citoyenne.
Ce que nous subodorons, les séquences média nous le livrent ouvertement.
Voici, au fur et à mesure des reportages, les clés pour comprendre ce monde du futur :
-- le titre «Pourquoi nous combattons » d?un reportage nous renvoie à la série de films de propagande dirigée par Frank Capra pendant la deuxième guerre mondiale afin d?expliquer aux soldats américains la justesse de leur combat;
-- le menu d?information comporte une icône « Enlist », autrement dit « Enrôlez-vous » ;
-- le reportage montrant des soldats distribuant des balles aux enfants ressemble à s?y méprendre aux images de la libération (soldats américains distribuant des chewing-gums)
-- les divers encouragements qui parsèment les reportages font penser à la chasse aux sorcières des années cinquante (« Près de chez vous, participez vous aussi », « Un bon parasite est un parasite mort » ) ;
-- une certaine hypocrisie dans le politiquement correct fait explicitement allusion à la pratique de l?information chez les networks américains (on censure le carnage d?une vache ou une expérience de laboratoire mais on montre des cadavres mutilés et on annonce la retransmission prochaine, en direct et en exclusivité, d?une exécution à la chaise électrique).
Ce monde du futur est donc un prolongement des Etats-Unis qui s?est étendu à toute la planète (les jeunes de Buenos Aires semblent tout droit sortis des séries télé à la ?Beverly Hills?).
Cependant, les symboles ne sont pas toujours sans équivoques :
-- le drapeau de la fédération a une croix qui rappelle le drapeau sudiste et un aigle pour le moins ambigu puisqu?il peut évoquer tout aussi bien l?Amérique que l?Allemagne nazie ;
-- certains plans de troupes nous renvoient au ?Triomphe de la volonté?, de Léni Riefenstahl (cinéaste nazie) tout comme les flips de Johnny Rico nous renvoient aux plongeons acrobatiques des ?Dieux du stade? de la même Riefenstahl ;
-- l?uniforme qu?arbore Carl à la fin du film est celui de la Gestapo.
En faisant converger les images de la sorte (propagande américaine et symbolique nazie), Paul Verhoeven et Ed Numeier nous montrent que la démocratie américaine et l?Allemagne nazie, en dépit du fossé qui sépare les deux régimes, se rejoignent quelque part dans les limbes du sentiment nationaliste puisqu?elles se sont toutes deux construites et affermies en misant sur la rhétorique guerrière et le déni de l?Autre (les parasites sont respectivement les indiens puis les communistes pour les américains, les juifs pour les nazis).
Les faux-airs de western qu?emprunte parfois le film (des colons mormons s?installent dans un territoire sauvage et se font massacrer, des militaires subissent un siège dans un fort retranché) finissent de convaincre que c?est bien de l?Amérique qu?il s?agit.
Le fait que la victoire ne soit vraiment acquise que quand le «cerveau » parasite a peur, qu?un professeur influent soit en même temps militaire chevronné (et à un degré moindre, que Carl ait convaincu sa mascotte d?agir en lui faisant croire qu?il y a un danger) nous renseigne un peu plus sur cette inquiétante Amérique qui ne livre qu?une seule et même bataille depuis sa création : celle de la domination, que ce soit par la persuasion ou par la force.
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